Suncor fait un autre pas vers des tests aléatoires de dépistage de drogues pour les employés occupant des postes à risque

Mondial Publication Octobre 2017

La Cour d’appel de l’Alberta a récemment rendu une décision confirmant l’annulation d’un jugement qui restreignait le droit légal de Suncor de mettre en œuvre des tests aléatoires de dépistage des drogues et de l’alcool pour les employés syndiqués occupant des postes à risque. La question principale consistait à déterminer si Suncor devait démontrer l’existence d’un problème d’alcoolisme ou de toxicomanie au sein de l’unité de négociation en particulier ou si la preuve démontrant un problème généralisé en milieu de travail était suffisante.

En confirmant la décision du tribunal en révision, la cour a souligné l’importance d’un environnement de travail sécuritaire par rapport au droit à la vie privée des employés syndiqués.



Contexte

Suncor a mis en œuvre des tests aléatoires de dépistage des drogues et de l’alcool pour les employés occupant des postes à risque dans certaines de ses installations dans la région de Fort McMurray en 2012.1 Le syndicat représentant un bon nombre d’employés a déposé un grief alléguant la violation du droit à la vie privée des travailleurs syndiqués2.

La majorité d’un tribunal d’arbitrage a tranché en faveur du syndicat en 2014, concluant que Suncor n’avait pas fait la preuve de problèmes de sécurité suffisants au sein de l’unité de négociation pour justifier les tests aléatoires de dépistage3. La décision a été infirmée par le juge Nixon de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta l’an dernier.

La question soumise à la Cour d’appel consistait à déterminer si la norme de contrôle choisie par le juge Nixon était appropriée et si elle avait été appliquée de manière appropriée4.

Les tribunaux tiendront compte de l’alcoolisme et de la toxicomanie dans le milieu de travail, pas seulement au sein d’une unité de négociation

Le fondement juridique justifiant les tests aléatoires de dépistage des drogues et de l’alcool a été examiné à nouveau dans la cause du Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 30 c. Pâtes & Papier Irving, Ltée, 2013 CSC 34, [2013] 2 RCS 458 (Irving). Dans l’arrêt Irving, la Cour suprême du Canada a expliqué que la dangerosité d’un lieu de travail n’est pas, en soi, suffisante pour justifier l’imposition de tests aléatoires de dépistage des drogues et de l’alcool pour les employés syndiqués. Il est aussi exigé que soit démontrée l’existence d’un risque accru pour la sécurité, comme un problème généralisé d’alcoolisme ou de toxicomanie en milieu de travail5.

Suncor a démontré que les lieux de travail dans la région de Fort McMurray sont dangereux en soumettant des preuves portant sur le type de travail exécuté par les employés occupant des postes à risque. Les lieux de travail sont situés près de régions sensibles sur le plan environnemental et de collectivités peuplées6. Les employés effectuent généralement des quarts de travail de 12 heures et manœuvrent certains des équipements miniers et industriels les plus imposants et complexes au monde7.

Suncor a établi l’existence d’un problème généralisé d’alcoolisme ou de toxicomanie en milieu de travail en démontrant que plus de 2 200 incidents étaient liés à la consommation de drogues ou d’alcool. Cependant, Suncor n’a pas indiqué combien de ces incidents impliquaient des employés syndiqués par rapport à des employés non syndiqués et à des entrepreneurs8.

C’est la preuve « abstraite » qui a amené le tribunal d’arbitrage à trancher en faveur du syndicat9. Le banc a suggéré qu’il devait tenir uniquement compte de la preuve démontrant un problème de consommation de drogues et d’alcool au sein de l’unité de négociation10. Le juge Nixon a conclu que cette suggestion élevait déraisonnablement le seuil de démonstration d’un problème de consommation de drogues et d’alcool en milieu de travail. La question appropriée, décrite dans l’arrêt Irving, est de déterminer s’il est démontré qu’il existe un problème généralisé d’alcoolisme ou de toxicomanie en milieu de travail11.

En soutenant la décision du juge Nixon, la Cour d’appel de l’Alberta a conclu « [traduction] qu’en restreignant déraisonnablement la norme de preuve dont il a été tenu compte pour trancher la cause, la majorité du tribunal a effectivement posé la mauvaise question et donc appliqué le mauvais critère juridique »12.

La Cour d’appel a expliqué que les employés syndiqués, les employés non syndiqués et les employés des entrepreneurs travaillaient tous côte à côte, au sein d’une main-d’œuvre intégrée sur des lieux de travail intégrés13. Il n’existe aucun motif raisonnable pour établir une distinction entre la preuve de problèmes d’alcoolisme ou de toxicomanie dans le milieu de travail dans son ensemble et la preuve de problèmes d’alcoolisme ou de toxicomanie propres aux employés syndiqués14. Par conséquent, la question a été renvoyée à un nouveau tribunal d’arbitrage et sera soumise à un nouveau banc d’arbitrage15.

Notes

[1].     Suncor Energy Inc v Unifor Local 707A, 2017 ABCA 313 au para 2 [Suncor].

[2].     Ibid, au para 2, 13.

[3].     Ibid, au para 16.

[4].     Ibid, au para 4.

[5].     Ibid, au para 39.

[6].     Ibid, au para 6.

[7].     Ibid, au para 7.

[8].     Ibid, au para 40.

[9].     Ibid, au para 19.

[10].   Ibid, au para 38.

[11].   Ibid, au para 39.

[12].   Ibid, au para 49.

[13].   Ibid, au para 48.

[14].   Ibid.

[15].   Ibid, au para 52.



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Associé, administrateur national canadien, Droit de l’emploi et du travail

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