Notre bureau de Montréal a obtenu gain de cause pour un client de longue date du cabinet, Bombardier inc., devant la Cour suprême du Canada dans une affaire visant à déterminer si une banque est tenue de refuser de faire un paiement au bénéficiaire d’une lettre de crédit s’il s’avère que la conduite de ce dernier est frauduleuse.

En 1998, Bombardier, société d’aviation établie à Montréal, a conclu, en Grèce, un contrat d’approvisionnement avec le ministère de la Défense de la Grèce (MDG) visant la vente d’aéronefs amphibies de lutte contre les incendies. Les parties ont conclu un contrat de compensation par lequel la société canadienne a convenu de sous‑traiter une partie des travaux liés à l’approvisionnement des aéronefs à des entreprises grecques. Toutefois, le contrat de compensation stipulait que Bombardier serait redevable de dommages‑intérêts liquidés au MDG si elle ne s’acquittait pas de ses obligations en matière de sous‑traitance. Le paiement de ces dommages‑intérêts liquidés a ensuite été garanti par une première lettre de crédit émise par une banque grecque en faveur du MDG, puis par une seconde lettre de crédit émise par une banque canadienne en faveur de la banque grecque.

Un litige a par la suite éclaté entre le MDG et Bombardier concernant les obligations en matière de sous‑traitance. Le MDG s’est engagé à ne pas exiger de paiement au titre de la lettre de crédit tant que la sentence arbitrale finale ne serait pas rendue. Malgré cet engagement, le MDG a demandé le paiement à la banque grecque. En réponse, Bombardier a sollicité et obtenu diverses ordonnances afin d’empêcher tout paiement par les banques participantes. Malgré ces ordonnances, le MDG a présenté d’autres demandes de paiement, auxquelles la banque grecque a finalement accédé, après quoi elle s’est tournée vers la banque canadienne à qui elle a présenté une demande de paiement aux termes de la seconde lettre de crédit.

Notre équipe a d’abord obtenu une injonction interdisant à la banque canadienne de distribuer des fonds à la banque grecque en vertu de la seconde lettre de crédit, au motif que le MDG avait commis une fraude et que la banque grecque en avait eu connaissance; puis une autorisation d’interjeter appel a été octroyée à la banque grecque vers le milieu de l’année 2023. 

Nous avons représenté Bombardier dans le cadre du pourvoi devant la Cour suprême du Canada qui a été rejeté le 5 avril 2024. Les juges majoritaires ont conclu qu’étant donné que la banque grecque était au courant de la fraude commise par le MDG et qu’elle y avait participé, cette fraude pouvait lui être imputée, et ont interdit les paiements par la banque canadienne en vertu de la seconde lettre de crédit. C’est la première fois depuis 1987 que la Cour suprême du Canada était saisie d’une affaire d’exception de fraude à des lettres de crédit internationales et la première fois de son histoire qu’elle entendait une affaire visant une lettre de garantie et une lettre de contre-garantie.

Il s’est agi d’un véritable travail d’équipe. Le pourvoi a été mené par Sophie Melchers et comprenait Michel Sylvestre (aujourd’hui à la retraite) et Jérémy Boulanger-Bonnelly. Michel Sylvestre a piloté les procédures et audiences antérieures avec l’aide de plusieurs membres du bureau de Montréal. Charles P. Blanchard, de Bombardier, a également joué un rôle crucial au sein de l’équipe.