Sursis de dernière minute pour les spécialistes du marketing électronique : le gouvernement suspend le droit privé d’action pour violation des lois anti-pourriel

Publication Juin 2017

Depuis 2014, nous suivons l'évolution de la Loi canadienne anti-pourriel (Loi ou LCAP1), souvent décrite comme la législation la plus rigoureuse du monde dans ce domaine. Le 1er juillet 2017, la dernière vague de dispositions de la LCAP devait entrer en vigueur et prévoir, notamment, un droit privé d’action (DPA) en cas de contravention à la Loi2.

Le 7 juin 2017, invoquant l’ampleur des préoccupations soulevées par les entreprises et les organismes de bienfaisance, le gouvernement du Canada a suspendu l’application du DPA en attendant un nouvel examen de la Loi par un comité parlementaire.



Le droit privé d’action

À l’heure actuelle, seuls les organismes de réglementation compétents peuvent intenter des poursuites en cas de violation de la LCAP. À compter du 1er juillet, toutefois, le nouveau recours pouvant être exercé en vertu du DPA aurait permis à n’importe quel particulier (ou n’importe quel groupe de particuliers) d’intenter une poursuite en alléguant des contraventions liées à l’envoi de messages électroniques commerciaux (MEC) et à l’installation de programmes d’ordinateur aux termes de la LCAP, de même que des contraventions à la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques en ce qui a trait au consentement ou à l’autorisation à l’égard de la collecte de renseignements ainsi qu’à l’article 74.011 de la Loi sur la concurrence (pratiques commerciales trompeuses relativement aux messages électroniques).

Importante responsabilité civile éventuelle

Le DPA comportait deux chefs de dommages en cas de contravention à l’une des dispositions précitées, et l’un ou l’autre ou les deux pouvaient être demandés :

  • les dommages correspondant à la perte réelle subie;
  • une somme maximale de 200 $ par contravention, jusqu’à concurrence de 1 000 000 $ par jour, peu importe qu’une perte ait ou non été subie.

Le DPA aurait permis d’intenter des poursuites, non seulement contre la société ou la personne directement responsable de la contravention, mais également contre des dirigeants, des administrateurs et des mandataires s’ils étaient complices d’une manière ou d’une autre, même si la société n’était pas nommément désignée quant à elle.

Étant donné que peu de personnes physiques auraient réellement subi des dommages, on s’attendait à ce que les violations donnent lieu à des actions collectives dans le cadre desquelles la sanction maximale de 200 $ prévue par la loi serait demandée pour chaque consommateur ayant reçu un courriel non conforme. Le risque auquel les entreprises étaient exposées en vertu du DPA était très important.

Un sursis bien accueilli… pour l’instant

Plusieurs observateurs et entreprises ont exprimé des préoccupations au sujet du DPA, faisant valoir que, vu le fait que les dommages réels n’avaient pas à être prouvés, la responsabilité entraînée pouvait être tout à fait disproportionnée par rapport au préjudice subi (si tant est qu’un préjudice ait été subi). Le gouvernement a annoncé qu’il favorisait une « approche équilibrée » dans le cadre de l’examen et de la révision du DPA par le parlement. Reste à voir si l’examen mènera à une solution qui apaisera les préoccupations actuelles du secteur.  

Notes

1 Loi visant à promouvoir l’efficacité et la capacité d’adaptation de l’économie canadienne par la réglementation de certaines pratiques qui découragent l’exercice des activités commerciales par voie électronique et modifiant la Loi sur le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, la Loi sur la concurrence, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques et la Loi sur les télécommunications, LC 2010, c 23 (aussi appelée Loi cannadienne anti-pourriel, ou LCAP)

2 LCAP, art 47-52



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