La Cour d’appel du Québec renverse la décision du ministre de retirer le Remicade de la liste des médicaments du Québec

Auteur:

 

Publication Février 2019

La Cour d’appel du Québec a déclaré que la décision du ministre de la Santé et des Services sociaux d’« exclure » le Remicade de la liste des médicaments du Québec (équivalent québécois de « Drug Formulary ») était invalide et a ordonné au ministre de réinscrire le Remicade sur la liste des médicaments. Deux conclusions ressortent de ce jugement : d’abord, la décision du ministre d’inscrire ou d’exclure un médicament en particulier est de nature administrative et non réglementaire; ensuite, la décision d’exclure un médicament peut exiger que le ministre respecte certaines normes minimales d’équité procédurale, ce que le ministre a omis de faire en l’occurrence.1

Contexte

En février 2017, le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec alors en fonction, M. Gaétan Barrette, a publié un avis de retrait du Remicade de la liste des médicaments et déclaré qu’il ne serait plus couvert par le régime d’assurance médicaments provincial (sauf dans certaines circonstances).

Ce retrait faisait suite à la conclusion, par le ministre, d’une entente d’inscription avec le fabricant de l’Inflectra, un médicament biosimilaire au Remicade. Le ministre s’appuyait sur le pouvoir conféré par l’article 60.0.4 de la Loi sur l’assurance médicaments, qui lui permet de retirer un médicament de la liste lorsqu’un médicament concurrentiel fait l’objet d’une entente d’inscription. Le ministre n’a pas donné de préavis à Janssen concernant l’annonce de sa décision et, selon les faits en cause, Janssen avait de bonnes raisons d’en être surprise. Janssen a présenté une demande de contrôle judiciaire de la décision du ministre.

Exigence d’équité procédurale

Le 16 janvier 2019, la Cour d’appel a déclaré que le ministre avait omis de respecter l’exigence minimale d’équité procédurale applicable dans les circonstances. Le tribunal a conclu, d’après le contexte factuel de la décision prise par le ministre, que le principe d’équité procédurale exigeait i) de donner un avis suffisant à Janssen au sujet de la prise éventuelle de cette décision, ii) de donner à Janssen l’occasion de présenter ses observations sur la décision à venir et iii) de fournir à Janssen les motifs à l’appui de celle-ci.

Concluant que l’omission du ministre de respecter l’exigence minimale d’équité procédurale justifiait l’invalidation de sa décision, le tribunal a ordonné la réinscription du Remicade sur la liste des médicaments. Le tribunal ne s’est pas prononcé sur le caractère raisonnable sur le fond de la décision du ministre.

Le tribunal a tenu compte d’une obligation d’équité au motif que la décision d’inscrire ou d’exclure un médicament en particulier sur la liste des médicaments est de nature administrative et non réglementaire, bien que la publication de la liste des médicaments dans son ensemble soit de nature réglementaire. Par conséquent, la décision du ministre concernant l’inscription d’un médicament en particulier peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire fondé sur la norme applicable aux décisions administratives, plutôt que sur la norme de contrôle applicable aux décisions réglementaires.

Il est probable que cette décision élargira les critères applicables au contrôle judiciaire des décisions ministérielles portant sur l’inscription ou l’exclusion de médicaments sur la liste des médicaments, mais fera également en sorte que le ministre doive tenir compte de l’exigence d’équité procédurale lorsqu’il prend la décision d’exclure un médicament. Toutefois, la teneur de cette exigence peut varier selon le contexte factuel.


Notes

1   Janssen inc. c. ministre de la Santé et des Services sociaux, 2019 QCCA 39 (CanLII).



Personnes-ressources

Conseiller juridique
Associée
Associée, cheffe canadienne, Sciences de la vie et soins de santé

Publications récentes

Abonnez-vous et restez à l’affût des nouvelles juridiques, informations et événements les plus récents...