Le 10 décembre 2020, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont publié l’Avis 55-317 du personnel des ACVM – Régimes d’aliénation de titres automatique (Avis 55-317) qui est disponible ici. L’Avis 55-317 fournit des indications à l’intention des émetteurs et des initiés concernant l’établissement, l’utilisation et l’administration des RATA, de même que la communication d’information à leur sujet.

L’Avis 55-317 remplace les indications antérieures à l’égard des RATA qui avaient été établies dans l’Avis 55-701 de la CVMO – Automatic Securities Disposition Plans and Automatic Securities Purchase Plans (Avis 55-701), qui avait été publié en 2006. 

Qu’est-ce qu’un RATA?

En vertu de la législation en valeurs mobilières, il est généralement interdit aux personnes qui entretiennent des « rapports particuliers » avec un émetteur, y compris les initiés, d’effectuer des opérations sur les titres de l’émetteur si elles possèdent de l’information non publique importante (INPI). Les initiés peuvent aussi être limités dans leur capacité à effectuer des opérations en raison de périodes d’interdiction totale des opérations et d’autres restrictions imposées par les politiques sur les opérations d’initiés d’un émetteur assujetti. 

Un RATA permet à une personne qui est assujettie à de telles restrictions de mettre en œuvre un régime aux fins de la vente automatique de ses titres conformément à un ensemble d’instructions préétablies. L’adhésion à un RATA vise à permettre à une personne qui dispose d’INPI d’être exemptée des interdictions d’opérations. Cela est généralement permis dans la mesure où certaines mesures de protection sont mises en place, essentiellement pour assurer : i) qu’au moment de l’adhésion à un RATA, l’initié ne dispose pas d’INPI et ii) que le RATA est véritablement automatique par essence (c’est-à-dire que l’initié n’est pas en mesure d’exercer une influence sur la façon dont les opérations sont effectuées en dehors des paramètres de négociation fournis dès le départ). En établissant les critères précis pour la vente et en retirant contractuellement le pouvoir discrétionnaire de la personne qui entretient un rapport particulier de diriger les opérations, la personne est, de façon générale, en mesure de compter sur un moyen de défense contre les allégations de délit d’initié ou sur une exclusion à l’égard de telles allégations en vertu de la législation en valeurs mobilières.

Principales recommandations

L’Avis 55-317 ne modifie aucune obligation légale actuelle ni n’en crée de nouvelle; toutefois, il apporte une clarification et un point de vue utiles relativement à l’interprétation, par les ACVM, des obligations légales actuelles et offre aux émetteurs des indications sur la façon de s’assurer qu’ils agissent conformément aux principes de saine gouvernance d’entreprise.

L’Avis 55-317 formule les six principales recommandations suivantes : 

Intervention de l’émetteur

Les émetteurs devraient surveiller l’établissement et l’utilisation des RATA par leurs initiés afin de s’assurer que ces derniers respectent la législation en valeurs mobilières ainsi que l’ensemble des politiques applicables que les émetteurs ont adoptées.

Au moment où un RATA est établi, l’émetteur devrait examiner les conditions des RATA et attester au courtier et/ou à l’administrateur du régime qu’à la connaissance de l’émetteur, l’initié ne dispose pas d’INPI et que le régime respecte la législation en valeurs mobilières et toute politique en matière d’opérations d’initiés ou autre politique interne pertinente. En prenant ces mesures proactives visant à évaluer le RATA et à assurer la conformité à la législation en valeurs mobilières et aux politiques de l’émetteur, un émetteur se donnera la possibilité d’éviter une éventuelle atteinte à la réputation associée à un manquement involontaire à la législation en valeurs mobilières.

Une fois que le RATA a été mis en œuvre, il est recommandé aux émetteurs de prendre des mesures raisonnables pour confirmer périodiquement que l’initié se conforme toujours aux conditions du RATA et à toute politique en matière d’opérations d’initiés ou autre politique interne pertinente adoptée par l’émetteur.

Paramètres clairs 

En ce qui concerne l’administration du RATA, les initiés devraient fournir, par écrit, des paramètres de négociation et autres instructions qui soient clairs au courtier et/ou à l’administrateur du régime au moment de l’adhésion au RATA. Ces instructions devraient préciser le nombre de titres à vendre (ou inclure une formule pour le calcul du nombre de titres à vendre), le prix minimum auquel ces titres peuvent être vendus ainsi que les dates ou autres fréquences fixes des ventes de ces titres. 

Le RATA devrait constituer un document autonome auquel le courtier et/ou l’administrateur du régime peuvent s’en remettre et qu’ils peuvent consulter au moment de procéder à des ventes. Le RATA devrait également interdire à la fois : i) au courtier et/ou à l’administrateur du régime de consulter l’initié sur les ventes ou les paramètres des ventes; et ii) à l’initié de communiquer des renseignements au courtier et/ou à l’administrateur du régime susceptibles d’exercer une influence sur l’exécution du régime. 

Durée minimale 

Lorsqu’un RATA est mis en œuvre, sa durée devrait être suffisamment longue (c’est-à-dire 12 mois) pour éviter l’utilisation éventuelle d’INPI. En outre, les ACVM recommandent d’éviter que les opérations soient concentrées au début de la durée du régime pour éviter la perception que les opérations sont réalisées en tirant parti d’INPI. 

Délai d’attente

Les ACVM recommandent également que les RATA comportent un délai d’attente suivant leur mise en œuvre avant que ne commencent les opérations aux termes du RATA. Les opérations dans le cadre du RATA ne devraient pas commencer avant le dépôt du prochain rapport financier intermédiaire ou des prochains états financiers annuels de l’émetteur, selon le cas. 

Modifications, suspension et résiliation

Afin de se conformer à la législation en valeurs mobilières, les RATA doivent comporter des restrictions importantes à la capacité de l’initié de modifier, de suspendre ou de résilier le régime. Si un régime peut être facilement modifié ou résilié, cela peut faire naître la perception que la modification ou la résiliation du régime par l’initié est motivée par de l’INPI.

Pour traiter la question de la perception et d’autres risques, les ACVM recommandent que les restrictions importantes suivantes soient imposées à la capacité d’un initié de modifier, de suspendre ou de résilier un RATA :

  • limiter le nombre ou la nature des modifications autorisées;
  • interdire la modification, la suspension ou la résiliation du régime pendant les périodes d’interdiction totale des opérations prévues par la politique de l’émetteur en matière d’opérations d’initiés;
  • exiger de l’initié qu’il déclare au courtier ou à l’administrateur du régime ne pas être en possession d’INPI au moment de la modification, de la suspension ou de la résiliation du régime;
  • exiger de l’initié qu’il demande à l’émetteur d’attester au courtier ou à l’administrateur du régime qu’à sa connaissance, l’initié n’est pas en possession d’INPI au moment de la modification, de la suspension ou de la résiliation du régime;
  • exiger de l’initié qu’il demande à l’émetteur d’attester au courtier ou à l’administrateur du régime que la modification, la suspension ou la résiliation est effectuée conformément à la politique en matière d’opérations d’initiés ou à toute autre politique interne pertinente de l’émetteur;
  • imposer le délai d’attente recommandé ci-dessus après toute modification ou suspension;
  • exiger de l’émetteur ou de l’initié qu’il indique dans un communiqué déposé au moyen de SEDAR les circonstances ayant mené à la modification, à la suspension ou à la résiliation et, selon le cas, la nature de la modification, ce communiqué devant comprendre également une déclaration de l’initié selon laquelle il ne disposait pas d’INPI au moment de cette modification, suspension ou résiliation; et
  • prévoir l’obtention de l’approbation du conseil d’administration de l’émetteur pour modifier, suspendre ou résilier le régime.

Communication d’information

Les ACVM ont recommandé que l’émetteur ou l’initié communique de l’information pertinente sur le RATA dans un communiqué déposé au moyen de SEDAR et qu’il communique l’établissement du régime.

Le communiqué devrait aussi indiquer les principales conditions du régime (c’est-à-dire les parties au régime, sa durée, le délai d’attente avant le début des opérations, de même que les restrictions sur la capacité de l’initié de le modifier, de le suspendre ou de le résilier), ainsi que le nombre de titres qui seront vendus dans le cadre du RATA et le prix minimal auquel ils peuvent l’être. Il est recommandé d’inclure d’autres renseignements en lien avec toute situation particulière se rapportant au régime, telle que sa suspension, sa résiliation ou sa modification.

Outre le communiqué, les ACVM recommandent aussi à l’initié qui dépose une déclaration d’initié dans le Système électronique de déclaration des initiés (SEDI) de préciser dans l’espace réservé aux commentaires que les opérations ont été effectuées dans le cadre d’un RATA.

Conclusion

L’Avis 55-317 fournit des indications utiles et pratiques aux émetteurs et aux initiés en vue de mieux établir et administrer les RATA et d’assurer la conformité aux lois applicables en valeurs mobilières et aux pratiques de gouvernance appropriées. Dans leurs indications, les ACVM ont fait clairement indiquer qu’elles s’attendaient à ce que les émetteurs interviennent dans la mise en œuvre et la surveillance des RATA. Par conséquent, les émetteurs devraient examiner attentivement les incidences des RATA au moment d’élaborer des politiques internes en matière d’opérations d’initiés et faire preuve de prudence lorsqu’ils permettent aux initiés de mettre en œuvre de tels régimes. Une fois qu’un RATA est mis en œuvre, les émetteurs devraient s’assurer de se faire communiquer et de traiter tout fait nouveau qui pourrait porter atteinte à la réputation de l’émetteur.

Veuillez communiquer avec les auteurs si vous souhaitez en apprendre davantage sur ces recommandations et/ou explorer la possibilité d’utiliser ou d’établir un RATA.

Les auteurs désirent remercier Fatima Anjum, stagiaire, pour son aide dans la préparation de cette actualité juridique.



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