Le projet de loi C-15, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 4 novembre 2025, a été présenté à la Chambre des communes et sa deuxième lecture est terminée. Ce projet de loi codifie la proposition inattendue du gouvernement canadien dans le Budget 2025 de modifier les dispositions relatives à l’écoblanchiment prévues dans la Loi sur la concurrence (Loi) comme suit :
- en supprimant l’exigence selon laquelle les entreprises doivent corroborer les indications environnementales concernant leur entreprise ou l’activité de leur entreprise au moyen d’une méthode reconnue à l’échelle internationale;
- en supprimant la possibilité pour les tierces parties de saisir directement le Tribunal de la concurrence en vertu des dispositions relatives à l’écoblanchiment régissant les indications environnementales sur les avantages d’une entreprise ou de l’activité d’une entreprise.
Ces dispositions n’ont été ajoutées à la Loi qu’en novembre 2023 dans le cadre du projet de loi C-59 et sont entrées en vigueur le 20 juin 2024, alors que le droit privé d’action élargi est entré en vigueur le 20 juin 2025.
Elles ont suscité d’importantes préoccupations et de vives critiques au sein du milieu des affaires — principalement en raison de l’incertitude que soulève la création d’une nouvelle méthode reconnue à l’échelle internationale, mais non encore définie. Cette incertitude, conjuguée au risque que des poursuites privées soient intentées par des groupes militants, a incité de nombreuses entreprises à revoir en profondeur leurs déclarations environnementales, voire à les retirer carrément. Pour en savoir plus sur ces dispositions, veuillez consulter notre Plateforme sur les modifications apportées à la Loi sur la concurrence.
Déclarations environnementales
Bien que la méthode reconnue à l’échelle internationale ne s’applique plus, si le projet de loi C-15 est adopté sans que cette disposition soit modifiée, les indications sur les avantages d’une entreprise ou de l’activité d’une entreprise pour la protection ou la restauration de l’environnement ou l’atténuation des causes ou des effets environnementaux, sociaux et écologiques des changements climatiques doivent toujours être « fondées sur des éléments corroboratifs suffisants et appropriés ».
La modification proposée à l’alinéa 74.01(1) (b.2) est la suivante :
74.01 (1) Est susceptible d’examen le comportement de quiconque donne au public, de quelque manière que ce soit, aux fins de promouvoir directement ou indirectement soit la fourniture ou l’usage d’un produit, soit des intérêts commerciaux quelconques :
[…]
(b.2) ou bien des indications sur les avantages d’une entreprise ou de l’activité d’une entreprise pour la protection ou la restauration de l’environnement ou l’atténuation des causes ou des effets environnementaux et écologiques des changements climatiques si les indications ne se fondent pas sur des éléments corroboratifs suffisants et appropriés, dont la preuve incombe à la personne qui donne les indications[.]
Il est important de noter que le gouvernement n’a pas proposé de modifier l’alinéa 74.01(1) (b.1), qui exige que les indications visant les avantages d’un produit pour la protection ou la restauration de l’environnement ou l’atténuation des causes ou des effets environnementaux, sociaux et écologiques des changements climatiques soient fondées sur une épreuve suffisante et appropriée. Cette exigence demeurera et demeure toujours assujettie à une exécution privée potentielle.
La suppression de l’obligation pour les entreprises de corroborer leurs indications sur les avantages d’une entreprise ou de l’activité d’une entreprise pour la protection ou la restauration de l’environnement ou l’atténuation des causes ou des effets environnementaux et écologiques des changements climatiques au moyen d’une méthode reconnue à l’échelle internationale s’avère un changement qui s’impose. Si ce changement est adopté, il pourrait réduire les coûts importants et l’incertitude pesant sur les entreprises.
Les entreprises doivent également garder à l’esprit que peu importe les modifications apportées aux dispositions relatives à l’écoblanchiment, les dispositions générales en matière de publicité trompeuse prévues dans la Loi, lesquelles interdisent de donner des indications fausses ou trompeuses sur un point important, continueront de s’appliquer à toutes les indications environnementales données par les entreprises dans le but de promouvoir leur entreprise, l’activité de leur entreprise et leurs produits.
Pour en savoir plus sur les dispositions de la Loi ayant trait aux indications environnementales, notamment celles qui sont susceptibles de demeurer en vigueur, il y a lieu de consulter notre Actualité juridique portant sur les lignes directrices du Bureau de la concurrence relatives aux déclarations environnementales.
Application des dispositions relatives à l’écoblanchiment
Le projet de loi C-15, s’il est adopté dans sa forme actuelle, ne supprime pas la possibilité pour les parties privées de soumettre toutes les plaintes en matière d’écoblanchiment au Tribunal de la concurrence. Elle ne supprime que la possibilité de déposer des plaintes en vertu de l’alinéa 74.01(1) (b.2) visant les indications sur les avantages environnementaux d’une entreprise ou de l’activité d’une entreprise. Les parties privées pourront toujours intenter des actions en vertu de l’alinéa 74.01(1) (b.1) visant les indications sur les avantages environnementaux d’un produit. Les deux types d’indications continueront d’être assujetties à des mesures d’application par des parties privées en vertu des dispositions générales sur les indications fausses et trompeuses.
Bien que l’on s’attendait à ce que des parties privées intentent sans délai des recours auprès du Tribunal de la concurrence après l’entrée en vigueur du droit d’exercer de tels recours en juin 2025, aucune tendance en ce sens n’a été observée en date de la présente Actualité juridique.
Points à retenir
Si le projet de loi C-15 est adopté sans que ces dispositions soient modifiées, nous prévoyons que les modifications apportées à la Loi recevront la sanction royale et entreront en vigueur au début de la nouvelle année, et fort probablement dès la fin du mois de janvier. Vu l’incertitude et les coûts liés à la conformité que ces dispositions ont représentés et continuent de représenter pour les entreprises exerçant leurs activités au Canada, force est de constater que ces modifications se font déjà rudement attendre.
Nous continuerons de suivre de près les interventions du gouvernement sur ces questions et porterons une attention particulière à l’échéancier et au libellé des modifications proposées.