Des défis sans précédent se posent pour les entreprises canadiennes dans le contexte de la propagation rapide de la COVID-19. Les chaînes d’approvisionnement sont mises à rude épreuve et les Canadiens sont inquiets de la disponibilité des biens essentiels.  Les associations industrielles et les différents ordres de gouvernement se penchent actuellement sur ces questions préoccupantes. Toutefois, il importe de rappeler que les concurrents qui se retrouvent à tout moment à travailler ensemble doivent demeurer conscients de leurs obligations en vertu de la Loi sur la concurrence même dans le contexte actuel. 
 
En plus de fixer les règles régissant les relations entre les concurrents, la Loi sur la concurrence régit également les questions de publicité trompeuse et prévoit l’examen des fusions. Voici six points à retenir à ce sujet :

  • Les accords entre concurrents pour fixer les prix, attribuer des marchés (clients ou territoires) ou contrôler, réduire ou éliminer la production sont illégaux. Les sociétés pourront devoir collaborer avec des sociétés rivales afin d’assurer la fourniture suffisante de biens essentiels aux Canadiens. Elles pourraient être tentées de s’entendre avec leurs concurrents pour fixer les prix pendant ces temps difficiles. Toutefois, aucun accord avec un ou plusieurs concurrents (ou concurrents éventuels) ne peut prévoir la fixation des prix, l’attribution de clients ou des restrictions visant la production sans contrevenir à la Loi sur la concurrence. Il n’est pas nécessaire que ces accords aient des répercussions négatives sur la concurrence. La violation de ces dispositions peut entraîner l’imposition d’une amende maximale de 25 000 000 $ ou un emprisonnement maximal de 14 ans, ou les deux et le commissaire de la concurrence a indiqué que le Bureau de la concurrence demeurait vigilant à l’égard de ces comportements.

  • Les accords entre concurrents autres que ceux mentionnés ci dessus sont permis tant qu’ils n’empêchent ou ne diminuent pas sensiblement la concurrence.  Dans une déclaration récente, le commissaire de la concurrence a souligné que la Loi « autoris[e] la collaboration entre entreprises lorsqu’elle favorise la concurrence en vue de soutenir la fourniture de biens et services abordables pour répondre aux besoins des Canadiens ».  Lorsqu’il est jugé qu’un accord viole la Loi, le Tribunal de la concurrence peut rendre une ordonnance interdisant à toute personne, qu’elle soit ou non partie à l’accord, d’accomplir tout acte au titre de l’accord ou enjoignant à toute personne de prendre toute autre mesure, si le commissaire et elle y consentent.  L’accord qui, bien qu’il empêche ou diminue sensiblement la concurrence, a ou aura vraisemblablement pour effet d’entraîner des gains en efficience qui surpasseront ou neutraliseront les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence ne fera pas l’objet d’une telle ordonnance en vertu de la Loi.

  • La Loi sur la concurrence ne régit généralement pas les prix.  Certaines inquiétudes ont été exprimées dans la presse et sur les médias sociaux au sujet d’allégations de prix gonflés. Majorer ses prix n’est pas en soi illégal. La Loi sur la concurrence n’interdit pas de gonfler les prix. Les sociétés sont plutôt, en règle générale, libres de fixer leurs propres prix. Par contre, il est important de rappeler que certaines provinces, dont l’Ontario, disposent de législation d’urgence qui, une fois adoptée, peut interdire le gonflement des prix.  

  • Le Bureau s’attaquera vigoureusement à la publicité trompeuse, particulièrement les indications fausses ou trompeuses au sujet de la capacité d’un produit à prévenir, à traiter ou à soigner le virus.  La Loi exige qu’avant d’être donnée, une indication visant le rendement doive être étayée par épreuve suffisante et appropriée. La violation des dispositions civiles en matière de publicité trompeuse peut entraîner une sanction administrative pécuniaire maximale de 10 000 000 $ pour une entreprise (15 000 000 $ pour les violations subséquentes) et le risque d’une demande en restitution.

  • L’examen des fusions prendra plus de temps.  Le Bureau de la concurrence a indiqué qu’en raison du nombre accru de gens travaillant à distance (parmi ses employés et dans le secteur privé), il devenait de plus en plus difficile pour le personnel du Bureau d’établir des contacts avec les intervenants des marchés, ce qui représente une façon cruciale de recueillir de l’information pour évaluer les répercussions possibles d’une fusion. Le Bureau surveille attentivement la situation et priorisera les dossiers pour maximiser ses ressources et respecter ses normes de service habituelles dans la mesure du possible. Les conseillers juridiques devraient maintenir des liens étroits avec les agents, mais les parties qui prévoient fusionner ou dont la fusion est en cours doivent s’attendre à des délais de traitement plus longs. 

  • Bien documenter toute décision de suspendre ou d’annuler des livraisons. Si vous êtes dans l’impossibilité de continuer à approvisionner vos clients pendant la pandémie, notamment pour des raisons liées à des questions de chaîne d’approvisionnement ou de manque de personnel, conservez des pièces justificatives de ces raisons. Elles pourront être nécessaires pour vous défendre contre des allégations de refus de vendre ou autres pratiques susceptibles d’examen. 

Les choses bougent très rapidement dans ce domaine. Des organismes antitrust d’autres pays ont pris des mesures plus agressives, y compris la suspension de l’application de la législation sur la concurrence dans certains secteurs touchés par la pandémie. Les sociétés doivent continuer à se renseigner quant à leurs obligations en vertu de la Loi sur la concurrence lorsqu’elles envisagent une mesure supposant la coopération avec des concurrents ou touchant autrement la concurrence.



Personnes-ressources

Associé principal, chef canadien, Gouvernance
Associé principal
Associée

Publications récentes

Abonnez-vous et restez à l’affût des nouvelles juridiques, informations et événements les plus récents...