Le moins que l’on puisse dire, c’est que la frénésie de la rentrée scolaire de cette année a été bien différente de celle des années précédentes. Les parents des enfants qui retourneront à l’école en personne (par opposition à l’apprentissage en ligne ou à distance, lorsqu’il est offert) ont non seulement du mal à trouver les bons stylos, marqueurs et cahiers, mais doivent également composer avec la possibilité que leurs enfants soient renvoyés à la maison au cours l’année scolaire pour des raisons liées à la pandémie.

Certaines questions relatives à la rentrée scolaire de cette année en Ontario

En raison de la COVID-19, le gouvernement provincial a récemment publié des Directives opérationnelles pour la gestion de la COVID-19 dans les écoles (directives opérationnelles). Les directives opérationnelles s’appliquent aux écoles et aux conseils scolaires ontariens.

Entre autres choses, les directives opérationnelles décrivent plusieurs scénarios dans lesquels un élève ou un membre du personnel peut être renvoyé à la maison. Ces scénarios s’appliqueront également aux centres de garde d’enfants et aux programmes avant et après l’école offerts dans les écoles.

Par conséquent, certains parents pourraient avoir du mal à trouver un équilibre entre leur travail et leurs obligations parentales au cours de l’année scolaire 2020-2021. Cette situation soulève nécessairement des questions pour les employeurs ontariens : que se passe-t-il lorsqu’un employé ne peut travailler parce que son enfant ou une personne à charge a été renvoyé à la maison? En bref, les employeurs peuvent avoir l’obligation d’offrir des mesures d’adaptation aux employés ayant des obligations parentales dans ces circonstances. 

Pour aider les employeurs à gérer les défis uniques de la rentrée scolaire 2020, nous présentons un bref résumé des nouvelles directives opérationnelles ci-dessous, ainsi qu’une mise à jour sur les obligations de l’employeur en matière de mesures d’adaptation liées à la situation familiale.

Gestion de la COVID-19 dans les écoles ontariennes

Les directives opérationnelles exigent que toute personne présentant des symptômes de maladie – que ce soit des reniflements (sans rapport avec les allergies saisonnières, etc.) ou de la toux – doive demeurer à la maison ou y soit renvoyée. Avant d’être autorisés à retourner à l’école, les enfants et leurs parents devront demander un avis médical et peut-être subir un test de dépistage de la COVID-19, selon le cas ou comme le recommande leur fournisseur de soins médicaux.

L’élève qui subit un test de dépistage de la COVID-19 devra suivre les recommandations de son fournisseur de soins médicaux concernant son isolement et son retour à l’école. Tous les autres membres du foyer qui fréquentent une école ou un centre de garde d’enfants devront également consulter leur fournisseur de soins de santé afin de déterminer quand ils pourront y retourner. Les personnes ayant obtenu un résultat négatif au test de dépistage de la COVID-19 doivent attendre au moins 24 heures après la disparition de leurs symptômes avant de retourner à l’école.

Cependant, lorsqu’un enfant ou un membre du personnel reçoit un résultat positif au test de dépistage de la COVID 19, les directives opérationnelles indiquent ce qui suit :

  • Les personnes ayant obtenu un résultat positif au test de dépistage de la COVID-19 ne devraient pas retourner à l’école avant une période d’isolement de 14 jours et la réception de la notification de congé d’isolement de la part du bureau de santé publique local ou de leur fournisseur de soins de santé. Les élèves qui sont renvoyés à la maison seront encouragés à poursuivre l’apprentissage à distance si leur état de santé le permet.
  • Les membres du foyer et d’autres personnes vivant sous le même toit que la personne ayant obtenu un résultat positif au test de dépistage (que ce soit un parent, un enfant, etc.) doivent s’isoler pendant 14 jours.
  • Le bureau de santé publique local avisera l’école si une personne a reçu un diagnostic positif de COVID-19 et déterminera s’il existe un risque de transmission aux autres personnes présentes dans l’école. Une évaluation des élèves et du personnel sera réalisée afin de déterminer si ces personnes présentent une exposition à risque élevé (nécessitant par conséquent le placement en isolement) ou une exposition à faible risque (nécessitant l’autosurveillance des symptômes et autorisant le retour à l’école).
  • Généralement, il sera considéré que les élèves et le personnel appartenant à la cohorte de la personne ayant reçu un diagnostic positif présentent un risque élevé d’exposition. Le bureau de santé publique local leur demandera de s’isoler et de subir un test de dépistage de la COVID-19 au cours de leur période d’isolement. Cependant, même les personnes qui obtiennent un résultat de test négatif doivent terminer leur période d’isolement.
  • S’il survient une éclosion – soit au moins deux cas de COVID-19 qui sont liés au sein de la même communauté scolaire –, le bureau de santé publique local déterminera les mesures à prendre, y compris quelles cohortes devraient être renvoyées à la maison ou s’il est nécessaire de procéder à la fermeture totale ou partielle d’une école en s’appuyant sur l’ampleur de l’éclosion.

Les employés ayant des enfants d’âge scolaire peuvent donc se retrouver soudainement sans services de garde d’enfants ni surveillance pendant la journée de travail. Qu’est-ce que cela signifie pour les employeurs ontariens?

Il existe manifestement un certain nombre de scénarios dans lesquels les élèves peuvent être renvoyés de l’école et/ou du centre de garde de façon inattendue et rapide, ce qui signifie que des parents pourraient avoir du mal à concilier leur travail et leurs obligations parentales au cours de l’année scolaire 2020-2021. Les employeurs assujettis à la réglementation provinciale ou fédérale exerçant leurs activités en Ontario doivent savoir que, dans certains cas, les circonstances peuvent entraîner des obligations en vertu de la législation applicable en matière d’emploi ou de normes du travail, notamment les congés spéciaux liés à la COVID-19, en plus d’autres congés avec protection de l’emploi. Cela signifie que même lorsque l’employé n’est pas admissible à un congé spécial lié à la COVID-19, les employeurs doivent, avant de refuser une demande de congé, examiner si, dans les circonstances, l’employé aurait droit à un autre congé avec protection de l’emploi en vertu de la législation applicable. 

À moins que la législation ou une politique ou pratique de l’employeur n’exige que les congés soient payés, ce temps n’est généralement pas rémunéré. Les employés peuvent alors demander diverses prestations gouvernementales. Les employeurs doivent également savoir que l’admissibilité des employés à ces congés varie généralement selon les années de service de l’employé, la nature du congé et d’autres questions juridiques. En outre, certaines dispositions relatives aux congés imposent également aux employés des exigences variables quant à l’obligation de fournir à leur employeur un préavis approprié et des pièces justificatives. 

En manœuvrant sur ce terrain, les employeurs doivent également être attentifs à toutes les conséquences éventuelles liées aux droits de la personne aux termes des lois provinciales ou fédérales, qui sont examinées ci-dessous.

Employeurs assujettis à la réglementation provinciale

Dans le cas des employeurs assujettis à la réglementation ontarienne, les obligations peuvent découler de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi de l’Ontario (LNE) et du Code des droits de la personne de l’Ontario (Code). Plus particulièrement, les employeurs peuvent être tenus aux termes la LNE de donner aux employés la possibilité de prendre un congé spécial en raison d’une maladie infectieuse non rémunéré avec protection de l’emploi lorsque ceux-ci ne peuvent travailler pour certaines raisons personnelles liées à la COVID-19, notamment :

  • lorsque l’employé fait l’objet d’une enquête médicale, de surveillance médicale ou de soins médicaux liés à la COVID-19
  • lorsque l’employé est en quarantaine ou en isolement dans des circonstances particulières
  • lorsque l’employeur craint que l’employé puisse exposer d’autres personnes à la COVID-19 dans son lieu de travail
  • lorsque l’employé doit fournir des soins ou un soutien à certains membres de sa famille pour une raison liée à la COVID-19, ce qui comprend vraisemblablement les directives ou fermetures touchant les écoles ou les centres de garde, ou
  • lorsque l’employé est directement assujetti à certaines restrictions en matière de déplacement.

Pendant leur congé, les employés ont la possibilité de reporter la prise de leurs vacances à la fin de leur congé, et ils continueront à accumuler des années de service et de l’ancienneté auprès de leur employeur.

Ce congé a été mis en œuvre très tôt pendant la pandémie et s’applique rétroactivement au 25 janvier 2020. Cette possibilité de congé devait prendre fin le 4 septembre 2020, mais elle vient d’être prolongée jusqu’au 2 janvier 2021. Il peut donc s’appliquer aux employés devant s’occuper d’enfants qui ont été renvoyés à la maison en raison des mesures prévues dans les directives opérationnelles décrites ci-dessus pendant au moins la première moitié de l’année scolaire.

Outre le congé spécial en raison d’une maladie infectieuse, les employés peuvent être admissibles à d’autres congés avec protection de l’emploi aux termes de la LNE, comme le congé familial pour les aidants naturels, le congé familial pour raison médicale, le congé pour obligation familiale et/ou le congé en cas de maladie grave.

De plus, les employeurs ont des obligations en matière de droits de la personne aux termes du Code qui peuvent s’appliquer lorsque les enfants retourneront à l’école cette année, notamment en ce qui concerne l’interdiction de discrimination fondée sur la situation familiale. En Ontario, la situation familiale est définie comme « le fait de se trouver dans une relation parent-enfant ».

Aux termes du Code, les employeurs doivent tenir compte des besoins des employés victimes de discrimination fondée sur la situation familiale jusqu’au point du préjudice injustifié. Cela signifie qu’un employeur peut être amené à proposer des horaires de travail flexibles ou à accorder autrement à l’employé des congés (rémunérés ou non) si son enfant est renvoyé à la maison et que l’employé n’est pas en mesure de prendre d’autres dispositions pour la garde de cet enfant. Cela dit, il est important de souligner que l’étendue des obligations d’accorder des mesures d’adaptation de l’employeur et ce que signifie le préjudice injustifié nécessiteront une analyse factuelle de la situation particulière de chaque employé.

Employeurs assujettis à la réglementation fédérale

Dans le cas des employeurs assujettis à la réglementation fédérale exerçant des activités en Ontario, des obligations peuvent découler du Code canadien du travail (Code fédéral) et de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP).

Aux termes du Code fédéral, les employés travaillant dans des lieux de travail assujettis à la réglementation fédérale ont maintenant droit à un congé non rémunéré avec protection de l’emploi de 28 semaines au maximum s’ils ne sont pas en mesure de travailler ou indisponibles au travail en raison de la COVID-19, ce qui inclut les raisons liées aux responsabilités familiales en matière de garde des enfants. Le 1er octobre 2020, ce congé devrait être supprimé, sauf indication contraire aux termes du Programme du travail du gouvernement fédéral.

À l’instar des employés assujettis à la réglementation provinciale, les employés assujettis à la réglementation fédérale peuvent également avoir droit à d’autres congés avec protection de l’emploi, rémunérés ou non, aux termes du Code fédéral, comme le congé personnel, le congé pour raisons médicales, le congé de compassion et/ou le congé en cas de maladie grave.

Enfin, en ce qui concerne les droits de la personne, les employés assujettis à la réglementation fédérale disposent de protections aux termes de la LCDP, qui interdit également la discrimination fondée sur la situation familiale. Bien que la LCDP ne définisse pas ce terme, il comprend généralement les situations où la personne devient légalement tenue de fournir des soins ou les situations où une personne doit fournir des soins à un membre de sa famille. Tout comme dans la sphère de compétence provinciale, les employeurs seraient bien avisés d’examiner attentivement les mesures d’adaptation qui peuvent raisonnablement être prises pour les employés pouvant avoir droit à des protections aux termes de la législation sur les droits de la personne au cours de cette année scolaire.

École à domicile et apprentissage à distance

En Ontario, cette année, les parents ont le choix de renvoyer leurs enfants en classe ou de leur permettre de rester à la maison pour poursuivre leurs études à distance et en ligne. Certains parents peuvent également choisir de scolariser leurs enfants à domicile cette année. Pour de nombreux employeurs, cela peut soulever une question essentielle : les obligations des employeurs en matière de congé et de droits de la personne peuvent-elles s’appliquer lorsque les parents choisissent de ne pas renvoyer leur enfant en classe? 

En général, les congés prévus par la loi et droits et obligation liés aux droits de la personne se rapportant à la situation familiale ne s’appliquent pas en cas de préférences personnelles ou de confort personnel. Autrement dit, si des employés soutiennent qu’un congé ou une mesure d’adaptation doit leur être offert en vertu de la loi en raison de leur choix personnel de garder un enfant à la maison cette année, d’aucuns pourraient faire valoir que certaines des normes d’emploi ou des obligations liées aux droits de la personne imposées à l’employeur qui sont décrites ci dessus ne devraient pas s’appliquer en l’absence de circonstances extraordinaires.

Cela dit, la limite entre ce qui est considéré comme une « préférence personnelle » et une « obligation » en vertu de la loi est souvent floue. Par conséquent, il serait prudent que les employeurs ne rejettent pas d’emblée une demande d’adaptation au motif qu’il s’agit d’une préférence personnelle d’un employé sans d’abord examiner les aspects procéduraux de l’obligation d’adaptation. En effet, alors que la pandémie de COVID-19 continue d’entraîner la mise en œuvre de moyens nouveaux et novateurs d’apprendre et d’interagir virtuellement et à distance, il faut encore déterminer l’incidence de cette pandémie sur le droit dans ce domaine et comment celle-ci permettra de modeler (ou de remodeler) les questions d’ordre juridique liées aux mesures d’adaptation fondées sur la situation familiale dans les lieux de travail en Ontario.

Points à retenir

Les employeurs doivent être conscients de l’impact que les incertitudes de l’année scolaire 2020-2021 pourrait exercer sur leur effectif. Pour atténuer les risques éventuels à cet égard, il serait prudent que les employeurs s’efforcent de mettre en œuvre des processus particuliers pour tenir compte des changements soudains aux obligations parentales de l’employé et de veiller à ce que ces processus soient conformes aux droits et aux obligations établis par les normes en matière d’emploi et de travail et la législation sur les droits de la personne qui s’appliquent. Comme toujours, les employeurs devraient toujours demander des conseils juridiques pour toute question particulière concernant les normes en matière d’emploi et de travail et les obligations en matière de droits de la personne qui leur sont imposées.



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