Juste avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi canadienne sur l’esclavage moderne, le gouvernement fédéral a publié des lignes directrices pour aider les organisations à savoir si elles devaient se conformer aux nouvelles exigences et, advenant le cas, ce qu’elles devaient faire pour y arriver.


La nouvelle loi canadienne sur l’obligation de faire rapport quant aux mesures prises relativement à l’esclavage moderne, la Loi sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaînes d'approvisionnement (Loi), est entrée en vigueur le 1er janvier 2024. Cette Loi impose des obligations de production d’un rapport aux entités qui participent à la production, à la fabrication, à la culture, à l’extraction, au traitement, à la vente et à la distribution de marchandises au Canada ou ailleurs ou à l’importation de marchandises au Canada. Pour plus de détails sur la Loi et les exigences liées au rapport, veuillez consulter nos précédentes publications ici et ici.

À la fin décembre, le gouvernement fédéral a publié des lignes directrices fort attendues sur la nouvelle législation (lignes directrices), qui incluent de l’information sur les sujets suivants :

  • l’application de la Loi (et la détermination des organisations devant s’y conformer);
  • la teneur et le contenu du rapport; et
  • la vue d’ensemble des étapes et du processus à suivre pour la rédaction, l’approbation et la soumission du rapport.

Depuis, le gouvernement fédéral a tenu une séance d’information dans le but de clarifier certains points de ses lignes directrices.

Bien que les lignes directrices reproduisent, en grande partie, les exigences énoncées dans la Loi, elles comportent aussi les nouvelles informations ou clarifications suivantes  :

Questionnaire

En plus du rapport en soi, les entités déclarantes doivent remplir un questionnaire en ligne lorsqu’elles soumettent un rapport au gouvernement. Le questionnaire compte plus de 30 questions obligatoires. Certaines questions portent sur l’entité déclarante (son territoire, si l’entité produit un rapport en vertu d’une autre loi sur l’esclavage moderne, qu’est-ce qui fait que l’entité répond aux critères d’entité déclarante, etc.). D’autres questions portent sur les exigences en matière de production de rapports en vertu de la Loi et sur les mesures précises prises par l’entité pour s’y conformer. Nombre de questions obligatoires sont suivies de questions facultatives ouvertes qui permettent aux entités d’élaborer leurs réponses si elles le souhaitent. Le gouvernement fédéral recommande fortement aux entités de répondre aux questions facultatives.

Ce nouveau questionnaire fait donc en sorte que les entités devront déclarer expressément ce qu’elles ont fait et ce qu’elles n’ont pas fait au cours de l’exercice précédent pour évaluer et réduire les risques associés à l’esclavage moderne dans leurs chaînes d’approvisionnement et leurs entreprises.

Lors de la récente séance d’information, le gouvernement a laissé savoir que seuls les rapports, et non les questionnaires, seront rendus publics. Les réponses au questionnaire aideront à la préparation du rapport annuel que le ministre responsable doit déposer devant le Parlement.

Format du rapport

  • Langue / traduction : Les entités peuvent remplir le questionnaire et soumettre leurs rapports en français ou en anglais. Le gouvernement recommande que les rapports soient présentés en français et en anglais « afin de les rendre accessibles au grand public canadien ». Il souligne également que « les demandes de copies traduites des rapports peuvent être adressées à l’entité responsable ». La traduction n’est pas expressément exigée par la Loi.
  • Nombre de pages : Une limite de 10 pages a été fixée par le gouvernement pour les rapports dans les lignes directrices (ou 20 pages pour les rapports présentés en français et en anglais). Toutefois, lors de la récente séance d’information, le gouvernement a précisé que la limite de 10 pages était un guide seulement et non une obligation. Les rapports peuvent compter plus de 10 pages. La seule vraie limite est la taille du fichier PDF, qui ne doit pas dépasser 100 Mo.

Rapports conjoints

  • Soumettre un rapport conjoint : Comme il est prévu dans la Loi, une entité peut choisir de soumettre un rapport conjoint couvrant ses propres mesures et celles de ses filiales ou autres entités appartenant au même groupe d’entreprises qui sont des « entités déclarantes » et sont, par conséquent, tenues de déposer un rapport. Un rapport conjoint doit indiquer clairement le nom de chaque entité visée par le rapport. 

    Le gouvernement précise dans les lignes directrices qu’un rapport conjoint ne doit être soumis que si les renseignements qu’il contient s’appliquent à toutes les entités visées par le rapport. Le rapport devrait également préciser quels renseignements sont propres à quelles entités. Le gouvernement indique qu’un rapport conjoint ne devrait pas être soumis lorsque des entités ont des profils de risque ou des politiques ou ont pris des mesures qui divergent considérablement et d’une manière qui rendrait difficile l’établissement d’un rapport décrivant avec précision toutes les entités.
  • Déclaration dans plusieurs administrations : Reconnaissant que certaines entités sont déjà assujetties à des exigences de déclaration dans d’autres pays dotés de lois semblables en matière d’esclavage moderne, le gouvernement a laissé savoir que les entités pouvaient soumettre un rapport global si ce rapport satisfait à tous les critères obligatoires de la Loi canadienne. Le gouvernement a aussi recommandé aux entités d’indiquer dans leurs rapports si elles ont également soumis un rapport en vertu des lois d’un autre territoire.

Portée du rapport

Même si les lignes directrices sont un peu floues sur ce point, selon notre compréhension, le rapport doit inclure les renseignements sur toutes les filiales que l’entité déclarante contrôle qui correspondent elles-mêmes à la définition d’« entité ». Selon les lignes directrices : « Si une entité contrôle d’autres entités, elle doit également décrire les mesures prises par ces entités contrôlées pour prévenir et réduire les risques de travail forcé et de travail des enfants. » Des indications semblables sont reprises dans les lignes directrices pour chaque partie du rapport. 

Approbation du rapport et du questionnaire

Le rapport doit être approuvé par le conseil d’administration de l’entité déclarante et signé par au moins un administrateur. Le libellé de l’attestation exigée est prévu dans les lignes directrices.

La personne qui soumet le rapport et le questionnaire qui y est joint pour le compte de l’entité doit être autorisée à cette fin et doit être en mesure de confirmer que le rapport a fait l’objet des approbations et attestations requises (y compris les approbations pertinentes de toutes les autres entités visées par un rapport dans le cas d’un rapport conjoint).

Ce que nous réserve l’an 1

Bien que des questions subsistent quant à l’application de la Loi et au contenu du rapport, le gouvernement fédéral s’est fait rassurant au cours de sa récente séance d’information en affirmant qu’il opterait pour une mise en œuvre graduelle de la Loi, sa priorité pour l’instant étant de faire connaître davantage cette Loi.

Le gouvernement veut surtout mieux faire connaître les exigences en matière de production de rapports prévues dans la Loi, favoriser le savoir opérationnel des entités déclarantes et établir des mécanismes d’interaction en vue d’améliorer les renseignements déclarés dans les rapports au fil du temps. Bien qu’il incombe légalement aux entités visées de se conformer aux exigences en matière de production de rapports énoncées dans la Loi et que les entités devraient présumer que les renseignements qu’elles soumettent feront l’objet d’une vérification de la part du gouvernement, ce dernier a indiqué que son intention, à court et à moyen terme, était de se concentrer sur la promotion et la sensibilisation.



Personnes-ressources

Associée, directrice principale, gestion du savoir et développement de la pratique
Associé principal, chef canadien, Gouvernance
Associée, cocheffe canadienne, Entreprises responsables et durabilité
Avocate
Avocat-conseil en savoir
Associée, cheffe canadienne, Transport

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