Dans l’affaire Hydro One Inc. v Power Workers Union (O’Reilly), un arbitre ontarien a eu l’occasion de se prononcer sur les demandes d’exemption des règles de sécurité en lien avec la COVID pour des motifs religieux. L’arbitre a conclu que l’employeur disposait d’un motif valable pour discipliner le plaignant qui avait refusé de se conformer à son exigence raisonnable de porter un masque au travail, en dépit de l’objection du plaignant fondée sur des motifs religieux. Le plaignant travaillait à titre de monteur de lignes électriques exécutant des tâches sur des lignes de transmission à haute tension.


Contexte

En réponse à la pandémie de la COVID-19, l’employeur avait adopté des règles raisonnables à l’égard du port du masque et de l’utilisation d’autre équipement de protection personnelle pour empêcher la propagation du virus parmi les employés. Malgré les directives répétées de la part de son employeur, le plaignant a simplement refusé de porter un masque, arguant que le port du masque allait à l’encontre de ses croyances religieuses catholiques.

Au soutien de sa demande, le plaignant a fourni une lettre de son prêtre, qui confirmait que même si l’Église catholique ne professe pas que le port du masque représente en soi un problème, cette mesure allait à l’encontre de la conscience du plaignant et l’Église enseigne que chacun doit obéir à sa conscience.

Après une discussion avec le plaignant, l’employeur en est venu à la décision de ne pas accepter sa demande d’accommodement, car il était d’avis qu’elle n’était pas valide. Il y avait aussi des éléments de preuve indiquant que le plaignant avait auparavant porté un masque dans d’autres circonstances, notamment en conduisant sa moto ou pendant une formation.

Le plaignant est ensuite retourné travailler, mais il a refusé de porter un couvre-visage approuvé en plusieurs occasions, ce qui lui a valu de nombreux entretiens d’ordre disciplinaire, une période de suspension observée et a mené ultimement à son congédiement pour non-respect des protocoles de sécurité de l’employeur liés à la COVID-19. Même si l’arbitre a reconnu que l’employeur avait tout fait pour trouver une solution avec le plaignant, il demeurait que dans la plupart des cas, le plaignant devait porter un couvre-visage pour effectuer bon nombre de ses tâches. Il a simplement refusé de se conformer à cette règle puisque celle-ci allait à l’encontre de sa bonne conscience.

Décision

L’arbitre a jugé que le refus du plaignant de porter un couvre-visage approuvé ne constituait pas un refus de bonne foi fondé sur une croyance religieuse.

Prenant en compte des éléments de preuve indiquant que l’Église catholique appuyait le port du masque (notamment une mesure appuyée par le pape) et l’usage du masque que le plaignant faisait dans certaines circonstances, l’arbitre a conclu que son refus relevait d’un choix personnel non fondé sur une croyance religieuse. Plus précisément, l’arbitre a déclaré ceci :

[traduction]
« le plaignant a droit à ses croyances et à son opinion personnelles, même si elles sont malavisées. Toutefois, le droit individuel du plaignant ne l’emporte pas sur le droit collectif de ses collègues à un lieu de travail sain et sécuritaire. »

À ce titre, l’arbitre a conclu que l’employeur n’était pas tenu d’accommoder la préférence personnelle du plaignant et qu’il disposait d’un motif valable pour lui imposer des mesures disciplinaires en raison de son refus de se conformer à l’exigence raisonnable de porter un masque, un refus qui a été jugé être une violation flagrante des règles de santé et de sécurité et de l’insubordination.

L’arbitre a donné au plaignant 30 jours pour décider s’il souhaitait ou non demeurer à l’emploi de son employeur. S’il le souhaite, il doit alors aviser l’employeur dans les 30 jours suivant la décision de l’arbitre de son acceptation de porter un masque dans les situations où il est requis de le faire, et il sera alors rétabli dans ses fonctions après une période de suspension observée. S’il ne souhaite pas demeurer à l’emploi de son employeur, son grief sera rejeté.

Conséquences pour les employeurs

Cette décision tombe à point pour les employeurs qui cherchent à renforcer les protocoles de sécurité liés à la COVID et à gérer les demandes d’exemption fondées sur des croyances religieuses. La décision est particulièrement éclairante puisqu’elle établit une distinction nette entre les croyances personnelles, les croyances situationnelles et les croyances propres à une religion.

Enfin, la décision traite du pouvoir discrétionnaire de l’arbitre dans le cadre de l’évaluation d’une pénalité appropriée. Malgré l’insubordination claire et continue du plaignant en lien avec une exigence élémentaire en matière de sécurité en lieu de travail, l’arbitre lui a accordé 30 jours supplémentaires pour choisir entre ses croyances personnelles et le maintien de son emploi.



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