Dans son budget 2025 vivement attendu, le gouvernement canadien a proposé, de manière inattendue, des modifications touchant les dispositions relatives à l’écoblanchiment prévues dans la Loi sur la concurrence (la « Loi ») comme suit :
- en supprimant l’obligation pour les entreprises de justifier leurs déclarations d’avantages environnementaux en fonction de normes méthodologiques reconnues à l’échelle internationale;
- en supprimant la possibilité pour les tierces parties de déposer des plaintes en matière d’écoblanchiment directement devant le Tribunal de la concurrence.
Ajoutées à la Loi en novembre 2023 dans le cadre du projet de loi C-59, ces dispositions sont entrées en vigueur le 20 juin 2024. Le droit privé d’action, quant à lui, est entré en vigueur le 20 juin 2025.
Ces dispositions ont suscité d’importantes préoccupations et de vives critiques au sein du milieu des affaires — principalement en raison de l’incertitude que soulève la création d’une nouvelle norme méthodologique reconnue internationalement, mais non encore définie. Cette incertitude, conjuguée au risque que des poursuites privées soient intentées par des groupes militants, a incité de nombreuses entreprises à revoir en profondeur leurs déclarations environnementales, voire à les retirer carrément. Pour en savoir plus sur ces dispositions, veuillez consulter notre série d’Actualités juridiques accessibles à partir de notre plateforme sur les modifications apportées à la Loi sur la concurrence.
Déclarations environnementales
Le budget ne précise pas si les déclarations relatives aux avantages d’un produit pour la protection ou la restauration de l’environnement ou l’atténuation des causes ou effets environnementaux, sociaux et écologiques des changements climatiques doivent encore comporter des indications fondées sur une épreuve suffisante et appropriée. À en juger par le libellé du budget, il appert que cette norme qui s’articule autour d’éléments corroboratifs continuera de s’appliquer telle quelle.
La suppression de l’obligation pour les entreprises de justifier leurs déclarations sur les avantages d’une entreprise ou de l’activité d’une entreprise pour la protection ou la restauration de l’environnement ou l’atténuation des causes ou des effets environnementaux et écologiques des changements climatiques conformément à des normes méthodologiques reconnues à l’échelle internationale s’avère un changement qui s’impose. Moyennant son adoption, ce changement pourrait réduire les coûts importants et l’incertitude pesant sur les entreprises. Même si les lignes directrices du Bureau de la concurrence sur les déclarations environnementales se sont révélées utiles pour mettre en contexte l’application de la norme méthodologique reconnue à l’échelle internationale, un flou important subsiste à l’égard de cette norme, notamment quant à la justification des déclarations nouvelles (par exemple en lien avec les nouvelles technologies d’atténuation).
Prochaines étapes
Pour l’heure, on ignore si le Bureau de la concurrence entend revoir, modifier ou retirer ses lignes directrices concernant les déclarations sur l’écoblanchiment, ou s’il envisage plutôt d’assortir celles-ci d’une mise en garde dans la foulée de la proposition énoncée dans le budget 2025. Il est également difficile de savoir si les dispositions particulières sur l’écoblanchiment prévues dans la Loi qui ont trait aux normes de corroboration fondées sur une méthodologie reconnue à l’échelle internationale seront entièrement supprimées ou si elles seront soumises à une nouvelle obligation en matière de corroboration.
Les entreprises doivent garder à l’esprit que peu importe les modifications apportées aux dispositions sur l’écoblanchiment, les dispositions générales en matière de publicité trompeuse prévues dans la Loi, lesquelles interdisent de donner des indications fausses ou trompeuses sur un point important, continueront de s’appliquer à toutes les déclarations environnementales faites par les entreprises dans le but de promouvoir leurs produits ou leurs activités commerciales.
Pour en savoir plus sur les dispositions de la Loi ayant trait aux déclarations environnementales, notamment celles qui sont susceptibles de demeurer en vigueur, il y a lieu de consulter notre Actualité juridique portant sur les lignes directrices du Bureau de la concurrence relatives aux déclarations environnementales.
Dépôt de plaintes en matière d’écoblanchiment devant le Tribunal de la concurrence
Le fait de supprimer la possibilité pour les parties privées de déposer des plaintes en matière d’écoblanchiment devant le Tribunal de la concurrence pourrait contribuer à atténuer le risque que des poursuites stratégiques soient intentées par des organismes militants (ayant auparavant déposé des plaintes auprès du Bureau de la concurrence). L’exercice de recours privés en vertu des dispositions générales susmentionnées en matière de publicité trompeuse prévues dans la Loi demeure toutefois possible.
Bien que l’on s’attendait à ce que des parties privées intentent sans délai des recours auprès du Tribunal de la concurrence après l’entrée en vigueur du droit d’exercer de tels recours en juin 2025, aucune tendance en ce sens n’a été observée en date de la présente Actualité juridique.
Principaux points à retenir
Dans l’hypothèse où le budget de 2025 est adopté, il est difficile de savoir à quel moment les modifications proposées touchant les dispositions en matière d’écoblanchiment prévues dans la Loi seront déposées, advenant qu’elles le soient. Vu l’incertitude et les coûts liés à la conformité que représentent ces dispositions pour les entreprises exerçant leurs activités au Canada, force est de constater que ces modifications se font déjà rudement attendre.
Nous continuerons de suivre de près les interventions du gouvernement sur ces questions et porterons une attention particulière à l’échéancier et au libellé des modifications proposées.
Pour en savoir plus sur le budget 2025, veuillez consulter nos Actualités juridiques portant sur les conséquences fiscales et celles relatives aux dépenses liées à la défense.